
On entre ici comme dans une histoire racontée au coin du feu, près d’une tente, en pleine forêt. Il faut avoir l’esprit ouvert, prêt à écouter. C’est l’heure du conte… Celui d’une femme sans nom, à l’identité trouble et à l’esprit troublé. Une femme qui écrit des lettres. Où vit-elle ? Dans une maison, sur une vaste propriété, près d’une rivière, et d’un cairn. Vous n’en saurez guère plus. Ne cherchez pas les noms des villages sur wikipedia, ne cherchez pas de date au fil du récit. Ne cherchez pas. Rien. Lisez comme on écoute.
Il était une fois, une femme. L’une des dernières à maîtriser les mots, à savoir les coucher sur papier, les border, comme seuls savent le faire ceux qui les aiment. De partout, les gens venaient la trouver. Elle, l’écrivaine. Elle, la sœur de. Car oui, elle avait eu une sœur, vénérée car guérisseuse. Chacune son don, son pouvoir. Mais la sœur n’est plus, seuls restent son souvenir et son aura, juste là, au-dessus. Au dedans. La maison sous sa bulle.
Un jour, un homme vint la trouver. Il avait besoin d’une lettre et avait de quoi payer. Alors il resta, quelques jours, le temps qu’elle rédige, et l’aida dans ses travaux quotidiens. Mais tout était sombre autour. Tout était ombre dedans. Atmosphère pesante partout. Cette femme, aussi crainte que respectée, accueillait une communauté d’Indésirables sur son terrain, et les familles du coin ne voyait pas cela d’un bon œil. A l’abri dans sa maison, recluse dans ses encres et ses velins, elle était encore protégée des alentours, mais pas de ses fantômes.
Et puis il y avait ces chiens, errants, abîmés. Et ces enfants, presque chiens. Et toujours cet homme, dont elle ne savait rien, rien que ce qu’il voulait qu’elle écrive.
Mais ne me lisez pas. Je ne sais pas raconter. Je ne suis pas de ceux qui savent embarquer. Lisez Alyson Hagy plutôt, parce qu’elle, elle sait. Il est dit que ce livre est une dystopie. Soit. Pour moi c’est un conte, le reste m’importe peu.
Vous dire que c’est superbement traduit reviendrait à vous mentir en vous faisant croire que j’ai aussi lu la VO, et ce n’est pas le cas. Alors je me contenterai de saluer le travail de traduction de David Fauquemberg parce qu’il a joué un rôle aussi important que l’autrice dans ma lecture. A-t-il respecté scrupuleusement la plume de l’autrice ? Je n’en sais rien. Mais ce que je sais, c’est que je n’ai pas lâché ce bouquin, et que c’est autant grâce à l’histoire qu’aux plumes qui l’ont dessinée.